Tout d’abord, l’article L.561-1 du Code de l’environnement énumère limitativement les risques naturels prévisibles qui peuvent justifier l’expropriation pour cause d’utilité publique, parmi lesquels on trouve les mouvements de terrain et les submersions marines. Une question demeure posée quant à l’assimilation de l’érosion aux mouvements de terrain mais il semble que la jurisprudence admette des expropriations pour risque d’érosion (par exemple, Cour de cassation, 3e Chambre civile, 21 mai 2003, (02-70099)) ; la stratégie nationale de gestion du trait de côte va également dans ce sens (Cousin, 2011)
Ensuite il est précisé que, pour recourir à l’expropriation, les risques identifiés doivent menacer gravement des vies humaines. L’article R.561-2 du Code de l’environnement précise qu’il s’agit de distinguer la gravité du danger (probabilité d’occurrence et délai de survenue du phénomène) et l’évaluation des délais nécessaires à l’alerte et l’évacuation des personnes exposées. Cette appréciation doit être effectuée par le représentant de l’Etat sur la base d’une analyse des risques (dont les méthodologies restent à affiner) et ensuite soumise à enquête publique.
A Plonévez cette analyse des risques pourrait s’avérer complexe pour une submersion consécutive à la rupture de la digue, dont la probabilité de survenance demeure difficile à préciser, même si la dégradation constatée de la digue ne laisse pas beaucoup de doutes quant à sa solidité. Ensuite, pour les villas exposées à l’érosion de la falaise, les conditions requises pour l’expropriation semblent à nouveau difficiles à garantir, notamment en raison de la difficulté à déterminer l’imminence et l’ampleur d’un effondrement.
Enfin, et conformément aux principes de la loi Barnier, l’expropriation du fait des risques naturels ne peut se faire qu’à la troisième condition de l’absence d’autre solution moins coûteuse (article R.561-2.III du Code de l’environnement). Là encore, les résultats des analyses coûts / bénéfices laissent souvent une part d’incertitude importante.
Outre ces limitations juridiques au recours à l’expropriation, cette dernière est très impopulaire et reste donc exceptionnelle. Mais la procédure de l’expropriation ne constitue pas le seul moyen d’éloigner les enjeux de la zone d’aléas. La relocalisation peut également être envisagée par la voie de transaction amiable. Une circulaire relative au fonds Barnier précise d’ailleurs qu’il convient de privilégier les acquisitions amiables par rapport à la procédure d’expropriation (Circulaire du 23 avril 2007).
Depuis un dizaine d’années, l’État souhaite clairement développer l’option du « retrait », qui permet de sortir de la logique des « coups partis » consistant à considérer que ce qui est bâti doit être inéluctablement protégé. Cependant, dans la pratique, les réticences sont tenaces et la destruction des enjeux reste une solution de dernier recours, la population et les élus locaux y étant généralement vivement opposés. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’Etat a lancé au printemps 2012 un appel à projet pour inciter les collectivités à réfléchir à l’option de la « relocalisation ».