photographie d'une plage en Bretagne et des risques de l'érosion naturelle

Hiérarchiser les enjeux : définir la vulnérabilité

La population constitue l’enjeu majeur à considérer en situation de crise. Les documents opérationnels (Dicrim) fournissent généralement des recommandations quant à l’attitude à adopter en cas de submersion marine, notamment celle de ne pas se déplacer inconsidérément. Les PCS définissent quant à eux les stratégies prévues pour sauver les populations des établissements les plus vulnérables comme les établissements recevant du public ou ERP (par exemple les établissements scolaires et de santé) pour lesquels sont prévues des dispositions particulières. Mais il est important d’accorder une attention tout aussi particulière au bâti des zones résidentielles qui sont souvent très développées dans les zones basses littorales.

Cinq critères principaux peuvent alors être retenus :

  • la hauteur d’eau : la montée rapide de l’eau et l’effet de surprise qu’elle entraîne sont des facteurs de danger pour la population. Comme au-delà d’un mètre d’eau il est admis qu’un « adulte sportif stressé » éprouve de grandes difficultés à se déplacer (Mercier and Chadenas, 2012), la hauteur d’eau est déterminante pour caractériser l’exposition au risque de submersion marine (voir la délimitation des zones submersibles).
  • la distance aux ouvrages de protection : l’analyse de la mortalité liée à la tempête Xynthia sur la commune de La Faute-sur-Mer (Vinet et al., 2012) a montré que 90 % des décès ont eu lieu à moins de 400 mètres des digues, démontre ainsi que les ouvrages de protection ne peuvent être considérés comme infailliblesLa cartographie des zones basses réalisée par les Services de l’Etat représente d’ailleurs une « bande forfaitaire de 100 mètres » en arrière des ouvrages de protection. Ces derniers font l’objet d’une cartographie à l’échelle nationale incluant la description de leur état d’entretien (Roche et al., 2014).
  • Par leurs caractéristiques architecturalesles constructions peuvent également s’avérer plus ou moins adaptées à une submersion marine (Jousseaume et al., 2004). Vinet et al. (2012) ont identifié les critères de vulnérabilité suivants : bâtiments de plain-pied, absence d’étage refuge ou d’issues sur le toit, etc. La collecte des données correspondantes nécessite des investigations sur le terrain, qui peuvent être optimisées par l’exploitation des données cadastrales (nombre d’étages, matériaux, etc.), mais aussi par l’utilisation de Google Street View.
  • La proximité d’une zone refuge, c’est-à-dire située au dessus de la cote de submersion, peut également être considérée : en cas de submersion marine elle peut permettre à la population de s’abriter temporairement et faciliter ainsi l’intervention des secours.
  • Enfin, certains travaux intègrent également un critère d’accessibilité. Il peut reposer sur une simple étude du réseau de communication existant, voire sur une modélisation numérique des déplacements en fonction de contraintes de circulation (Leone et al., 2013)

Exemple : L’indice VIE

Créach et al. (2014) ont développé un indice, appelé Vulnérabilité Intrinsèque Extrême (VIE), pour caractériser la vulnérabilité des constructions face au risque de submersion marine. Pour calculer cet indice, quatre critères sont additionnés : leur somme indique le niveau de vulnérabilité des bâtiments classés par une échelle de couleurs en quatre classes. Cette échelle représente le classement des constructions.
Classe A : constructions hors zone inondable et/ou dont l’indice V.I.E. est égal à 0 ;
Classe B : constructions inadaptées au risque de submersion marine, mais situées en zone potentiellement submersible par de faibles hauteurs d’eau donc présentant un risque limité
Classe C : constructions exposées à une submersion marine potentiellement importante (> 1 m) mais dont la configuration (présence d’étages), ne présente pas un risque potentiellement mortel ;
Classe D : maximum de l’indice V.I.E, caractérise les constructions où un risque de décès n’est pas à exclure en cas de submersion marine.

schéma en couleurs explications de l'indice de vulnérabilité intrinsèque
Indice de Vulnérabilité Intrinsèque Extrême (V.I.E.) : critères et architecture (Créach et al., 2014)

Pour tenir compte des effets de l’élévation du niveau marin liée au changement climatique, il est possible d’adapter l’indice en intègrant une élévation de 60 cm au niveau marin de référence actuel (MEDDE, 2014). VIE constitue ainsi un outil simple et transposable pour identifier les constructions résidentielles qui présentent un risque potentiellement mortel face au risque de submersion marine.